Tout ce qu’on ne vous dit pas sur l’accouchement mais qu’il vaudrait mieux savoir

Beaucoup de futures et jeunes mamans voient aujourd’hui dans l’hôpital et les cliniques un lieu sécurisant où des professionnels « savent » comment les faire accoucher. Le projet de naissance s’arrête trop vite au choix, ou non, d’une péridurale, d’une petite musique douce et d’une personne accompagnante le jour J, sans vraiment remettre en question les pratiques « automatiques » de ces maternités. Et pourtant, mieux vaut s’informer avant que regretter plus tard.
C’est avec cette illusion de choix que la plupart des maternités en France répondent aux questions des futures mamans : « notez-le dans votre projet de naissance et nous ferons notre possible pour le suivre ! » Puis, en discutant point par point de vos souhaits, vous vous heurtez à des « c’est impossible », « ça ne fonctionne pas comme ça » ou encore « faites-nous confiance ! ». La raison invoquée ? Les obligations légales, les « risques » pour vous ou pour le bébé… Pourtant, que cela soit dit tout de suite, l’article 1111-4 du Code de la santé publique vous donne bel et bien droit de décision concernant tout – oui, tout – ce qui est pratiqué sur votre corps, et stipule que ne peuvent être pratiqués que les actes auxquels vous avez consenti.
Pourquoi diable, dans ce cas, perfuse-t-on d’office toutes les futures mamans qui arrivent en travail à la maternité ? On vous expliquera que c’est par « sécurité » : si la perfusion est déjà posée, c’est un souci de moins et un gain de temps en cas de problème. Pourtant, cette perfusion entrave les mouvements de la maman. Rien de plus dramatique que l’inconfort, mais qui, du coup, augmentera la demande en péridurale, même pour celles qui souhaitaient s’en passer. Une solution alternative à cette perfusion ? Une voie d’accès dans la veine du poignet : c’est un petit cathéter fermé qu’on vous pose en arrivant. Encore fallait-il y penser!
Et elles sont nombreuses, ces petites astuces à connaître ou ces pratiques hospitalières discutables1 qui peuvent, lorsqu’on n’en est pas informé, faire tourner au cauchemar le bel accouchement nature qu’on idéalisait.

Les touchers vaginaux

En vérité, les pratiques médicales inutiles qui gênent, voire entravent, les futures mamans ne commencent pas au jour de l’accouchement. La plupart des mères les vivent dès le début de leur grossesse qu’il faut suivre et surveiller. Les touchers vaginaux sont alors répétés sans grande utilité sous prétexte de cette surveillance, et les femmes enceintes s’y plient pour le bien du bébé, sans savoir qu’il s’agit en fait de pratiques invasives que l’OMS recommande de minimiser et qu’elles sont en droit de refuser.
« Lorsque j’ai appris que j’étais enceinte, j’ai immédiatement pris rendez-vous dans une clinique avec un gynéco qu’une copine me recommandait, nous raconte Claire. Avant même de me poser des questions, il m’a demandé de me déshabiller pour aller “vérifier” que tout allait bien. Quand j’ai demandé plus de détails sur ce qu’il allait me faire, j’ai eu de sa part une réaction très virulente, il m’a même soutenu que j’étais inconsciente de refuser l’examen, alors que je ne l’avais pas encore refusé ! J’ai été très choquée, je voulais juste des explications. Je suis partie avec le sentiment d’être passée à deux doigts d’un viol. Le mot est fort, mais abuser de mon corps et de mon intimité et se jouer de mon intelligence, je ne vois pas comment le qualifier autrement ! »
En France particulièrement, la pratique du toucher vaginal est difficilement remise en cause par le corps médical. Ainsi, à partir du moment où une femme est enceinte et décide de le rester, il est normal de voir les doigts de tous les praticiens qu’elle croisera visiter son vagin. Dépossédée de son intimité, la future maman assiste silencieusement à une chosification de son corps qui ne lui appartient plus et devient une couveuse dont on surveille chaque centimètre.

Le décollement des membranes

Parmi les touchers vaginaux, il en est un, en fin de grossesse, que le gynécologue va qualifier « d’un peu plus appuyé ». Le gynécologue va, sans vous le dire clairement, pratiquer un « décollement des membranes ». En introduisant son ou ses doigts dans le col un peu ouvert par les contractions de fin de grossesse, il va venir décoller les membranes de l’œuf du pourtour du col de l’utérus. Ce toucher un peu plus appuyé fait évidemment mal, puisqu’il génère quelques contractions sur le coup (on tripote le col utérin !) et, tel est son objectif, des contractions tout court.
Heureusement, cette pratique, bien dénoncée également, a tendance à se faire plus rare. Toutefois, il ne coûte rien de préciser, au moment de la consultation : « Je refuse que vous pratiquiez un décollement de membranes. »

L’excuse du dépassement de terme

Motif de déclenchement, le dépassement de terme est dans la majorité des cas parfaitement physiologique.
Une grossesse ne dure pas neuf mois. Elle dure neuf cycles menstruels. Un cycle « normal » dure vingt-huit jours et tous les calculs, dont la date présumée d’accouchement, se basent sur cette norme. Or, si une maman a un cycle menstruel de vingt-neuf jours (à peine une petite journée de plus !), elle aura une grossesse qui durera neuf jours de plus que la norme. Il est donc parfaitement physiologique pour elle de dépasser la date présumée d’accouchement !
En France, on vous laisse un dépassement de terme de cinq jours, après quoi c’est le déclenchement. Curieusement, dans les pays autour de nous, ce délai est plutôt de dix, voire de quinze jours.

La surveillance par monitoring

Parmi les contraintes que les futures mamans subissent, le fameux monitoring est l’une des plus répandues.
Le monitoring sans fil peut être une alternative, mais d’une part toutes les maternités n’en sont pas équipées car c’est un matériel onéreux, d’autre part, la liberté de mouvement n’est pas totale, l’équipe médicale vous rappelant régulièrement à l’ordre en vous précisant que dans telle position, les capteurs ne sont plus assez bien placés. Sans compter que l’inconfort d’avoir un ventre serré dans une ceinture ne disparaît pas. Une autre demande, facile à formuler, peut vous aider : celle de couper le son du monitoring et de tourner l’écran loin de vous. Compromis, mais que peut-on espérer de mieux ?
Un accouchement sans monitoring, peut-être ? Malheureusement, c’est encore loin d’être imaginable dans nos contrées. La raison : le monitoring et son impression papier sont les preuves médico-légales que l’équipe hospitalière garde précieusement pour pouvoir se couvrir en cas de problème. Car ils ne pensent qu’à ça : au problème, à la pathologie… au grand détriment de la physiologie maternelle et fœtale.

La péridurale

Si j’évoque ici la péridurale, c’est parce qu’il est (trop !) commun de voir les équipes médicales pousser les femmes en travail à la prendre. Fragiles, en douleur, dans une situation où se mêlent peur, anxiété, excitation, les femmes font facilement confiance à l’équipe en charge et sont manipulables. Choisir une péridurale n’est pourtant pas un acte anodin, qui a des conséquences sur la maman et sur le bébé. Sur le déroulement de l’accouchement, aussi. Alors pourquoi pousse-t-on des mamans à la prendre, parfois contre leur souhait initial ?
Parce que la péridurale correspond au contrôle : contrôle de la position, de la douleur, de la vitesse des contractions (avec l’ocytocine de synthèse). Une maman sous péridurale est sondée, elle n’urine plus toute seule ; d’ailleurs, elle ne se lève plus du tout, elle n’utilise plus ses jambes. C’est une personne dépendante qui n’a d’autre choix que de s’en remettre à l’équipe médicale qui va pouvoir continuer sa cascade d’actes médicaux.

La sonde urinaire

Trop souvent, on sonde les futures mamans juste avant l’expulsion du bébé. On leur explique qu’il s’agit de s’assurer que la vessie est bien vide avant la descente de bébé, afin qu’il n’arrache pas la vessie avec sa tête et la fasse descendre dans le tractus pelvien. Sachez qu’il est tout à fait possible de s’opposer à être sondée, qu’une sonde urinaire est une source potentielle d’infection urinaire, et que pour limiter le risque évoqué d’arrachement de la vessie, il suffit de la vider régulièrement tout au long du travail en allant aux toilettes (et donc de conserver pour cela sa mobilité et sa capacité à se déplacer jusqu’aux toilettes).
« On m’avait beaucoup parlé du risque d’avoir une vessie incontinente si je refusais d’être sondée comme je l’avais stipulé dans mon projet de naissance, se souvient Aïcha, maman d’un bébé de 9 mois. On m’avait d’ailleurs fait très peur. Mais quand mon bébé est né avant même que j’atteigne la maternité, il n’a pas été question de sonde urinaire. Seulement de naissance. Ensuite, le médecin est arrivé avec une sage-femme, nous avons été transportés à l’hôpital et je pensais “Ma vessie ! Ma vessie ! Pourvu que ça aille !”. Curieusement, j’ai été la seule à m’en inquiéter. Personne n’a rien vérifié à ce sujet, et je suis parfaitement continente. C’est comme s’il avait fallu me faire peur avant pour que je l’accepte, mais qu’une fois le moment passé, ce n’était finalement pas si important que j’aie été sondée ou non. Je me suis sentie arnaquée. »

L’épisiotomie et autres coutures périnéales dont on peut se passer

L’épisiotomie consiste à découper le périnée de la future maman pour « élargir » l’ouverture vaginale afin que la tête du bébé passe mieux. Ce qu’on ne vous dit pas, c’est que ce faisant, on vous sectionne aussi les deux branches profondes du clitoris dont vous ne retrouverez plus jamais l’usage. Un petit détail qui n’est pas sans rappeler l’excision : pratique invasive pseudo-médicale qui mutile le corps féminin au point de le priver de son pouvoir de jouissance.
Une autre source de traumas périnéaux est l’instrumentalisation de la naissance du bébé, c’est-à-dire l’utilisation d’instruments comme les forceps, la ventouse, les spatules, au moment où le bébé s’engage dans le vagin. Il y a comme une angoisse folle de la part des équipes assistant à un accouchement dès que le bébé s’engage : il faut le retirer de sa mère le plus vite possible. Allez comprendre pourquoi un bébé qui a ouvert un col utérin, réussi à descendre jusqu’au vagin et commencé à se diriger vers la sortie est soudainement considéré incapable de venir au monde seul ! À nouveau, une part des difficultés que peut rencontrer l’enfant à ce moment-là vient de la position maternelle : la position gynécologique est une aberration en soi concernant le trajet que le bébé a à accomplir pour venir au monde. Devant cette ultime épreuve, il suffirait d’accompagner la maman dans une position facilitante, pour elle (elle pousse !) et pour le bébé ; mais on préfère plus généralement sortir des instruments pour extirper le petit d’homme de sa maman à la façon d’un bigorneau qu’on retire de sa coquille pour le gober. Les conséquences sur l’enfant ne sont pas étudiées, même si certains parlent de frustration, de perte d’estime de soi (on lui a enlevé la possibilité de jouir de la victoire de sa naissance !), de bébés en colère ou dont les caractères sont ensuite plus placides, attendant qu’on fasse pour eux comme en ce premier jour où il leur a été retiré la possibilité de faire eux-mêmes. En revanche, sur le périnée des mamans, on sait que les instruments causent des traumas, des lésions, des déchirures.

Le clampage précoce du cordon

Votre bébé est là, sur vous, mais tout n’est pas fini. Il y a la délivrance : l’expulsion du placenta. D’ailleurs, un placenta est relié à un bébé, normalement. Par son cordon, c’est lui qui le nourrit depuis neuf mois. Une fois le bébé hors de votre ventre, le placenta contient encore un tiers de son volume sanguin ! Autrement dit, votre bébé n’a que deux tiers de son sang dans les veines, il est plutôt bien anémié.
Manque de chance, si vous ne vous opposez pas franchement au clampage précoce du cordon, les sages-femmes et médecins s’empresseront de couper toute communication entre le bébé et son placenta à l’aide d’une grosse pince. Or, laisser le cordon finir de battre permet au bébé de récupérer le reste de son sang.
Plusieurs idées reçues circulent parmi les équipes médicales et vous seront avancées : laisser le cordon battre jusqu’au bout augmenterait le risque de jaunisse ou ictère du nourrisson ; le bébé peut faire une hémorragie par son cordon, son sang retournant dedans ; c’est dangereux car peu hygiénique… Sachez que toutes les études menées sur le sujet2 montrent que les avantages sont énormes à laisser le bébé profiter de ces derniers battements du cordon, qu’aucun risque d’augmentation des jaunisses n’y est corrélé et que la circulation sanguine dans le cordon après la naissance est faite d’une telle façon que le risque hémorragique évoqué, même si le bébé est plus haut que le placenta (lui posé sur votre ventre et le placenta dedans), est quasi nul. Il y a même des gynécologues-obstétriciens qui se positionnent favorablement au clampage tardif du cordon et qui cherchent à l’introduire dans les blocs opératoires pour les bébés nés par césarienne.
En conclusion, plus vous serez informées et plus vous vous heurterez à des aberrations du système médico-légal, en particulier si vous cherchez à faire des choix conscients pour vous et votre bébé en matière d’accouchement et de naissance. Il est important de préciser que les pratiques sont ce qu’elles sont aujourd’hui car nous les héritons d’une médecine patriarcale et invasive d’une part, et que nous vivons dans un système punitif où exercer la médecine nécessite de se couvrir sur le plan de la loi bien avant de prendre en compte le bien-être des patients et l’aspect humain que la pratique nécessiterait. Cet article n’a pas pour vocation de diaboliser la médecine, mais de donner des pistes aux parents qui le voudraient pour s’armer face à une institution qui, depuis trop de générations, dépossède les femmes de leur pouvoir d’enfantement et vole la naissance de milliers d’enfants qui auraient pu naître par eux-mêmes.


1 Voir l’article « Les violences dans les salles d’accouchement »
2 Voir par exemple : http://www.who.int/elena/titles/cord_clamping/fr/ ; Andrew Weeks, « Umbilical cord clamping after birth », BMJ, v.335(7615); 18 août 2007

2 réflexions sur “Tout ce qu’on ne vous dit pas sur l’accouchement mais qu’il vaudrait mieux savoir

  • 2 octobre 2020 à 11h38
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    Super Article, parfaitement aligné à ma pensée !!! ?
    A quelques jours du terme de mon accouchement physiologique, l’hôpital m’a informé que je ne pouvais pas refuser certains protocoles dit systématiques sur mon enfant. Ces protocoles étant anti-physiologiques, je les avais refusé dans mon projet de naissance en m’appuyant sur les recommandations de l’OMS qui indique qu’un clampage tardif du cordon ombilical est un soin néo natale essentiel, sur des études scientifiques qui s’accordent toutes pour montrer les bénéfices pour le nouveau né etc. Malgré cela, le chef de service obstétrique de la Maternité m’a dit qu’il refusait mon refus (en me citant des potentiels risques qui n’ont aucun rapport avec un clampage tardif du cordon, allant même jusqu’à des arguments qui ont été réfuté depuis les dernières recherches scientifiques appliquées déjà dans plusieurs grands Chu de France). Il m’a dit que je pouvais refuser les protocoles me concernant moi directement mais pas mon enfant. Si je me réfère à La loi Kouchner, je constate que je suis dans mon droit de refuser tout traitement ou protocole que je considère nuisibles pour ma santé, je pensais que c’était le cas aussi pour mon enfant, mais qu’en est légalement ?
    Ils ne veulent rien entendre à ce sujet, pensant que leurs protocoles et croyances limitantes (et dangereuses qui plus est) sont au dessus des lois. Quel recours légal ai-je pour faire respecter ma volonté et mon projet de naissance auprès de ce service de maternité qui va dans le sens inverse des recommandations des conseils de la Haute Autorité de Santé et de l’OMS ? Merci infiniment pour vos lumières

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    • 2 octobre 2020 à 12h36
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      Légalement, vous avez la responsabilité légale de votre enfant dès l’instant où il sort de votre corps et jusqu’à ses dix-huit ans. Il n’y a pas de moment de « latence ». Il nait, vous êtes responsable légal. Point.
      La loi Kouchner (art. 1111 du Code de la Santé Publique) dit qu’en tant que responsable légal, vous avez droit de décision sur tout ce qui touche à sa santé. Point aussi.
      Donc ce médecin ne connait visiblement pas la loi, ou bien cherche à vous embrouiller. Vous êtes parfaitement en droit de vous opposer à des soins et de poursuivre en justice la structure et/ou le personnel qui irait à l’inverse de vos décisions, surtout si elles ont été dites et transmises en amont et que vous en avez une trace écrite. Vous pouvez essayer de le lui rappeler, en croisant les doigts pour qu’il entende ce que vous dites.
      Si le dialogue reste bouché, demandez rdv avec l’avocat de l’hôpital en lui exposant que la structure et le chef de service ne sont pas au-dessus des lois et que vous avez conscience de la tentative de manipulation et des mensonges qui vous ont été servis, que vous venez aplanir la situation avant le jour J pour pouvoir accoucher sereinement mais que vous êtes prête à entamer des procédures si vos droits de femme et de mère sont bafoués. Souvent, ça suffit à refroidir les médecins zélés.
      C’est malheureux, mais la plupart du temps, pour être simplement respectée dans ses droits, il faut se battre de folie…! Bon courage 🙂

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