Il faut un village… De l’importance d’être bien entouré
Un proverbe africain bien connu dit qu’il faut un village pour élever un enfant. Nous le disons souvent dans ces pages, l’isolement est l’une des plaies des jeunes parents de nos sociétés « modernes ». Aujourd’hui, le village, on en est loin. Les familles sont éclatées, et l’aide que l’on pouvait autrefois obtenir des grands-parents, d’une tante, etc., se fait souvent trop rare, voire inexistante dans certains cas, en raison d’une distance géographique ou simplement relationnelle. Et les parents se retrouvent seuls…
Il existe un autre cas de figure, c’est celui où les proches pourraient/voudraient aider mais où notre vision de la parentalité ne correspond pas du tout à la leur. Parce que nous voulons préserver nos enfants de certains comportements, remarques ou exigences, nous refusons une aide dont nous avons pourtant bien besoin…
De l’aide au quotidien
Quand on parle avec de jeunes parents, on se rend compte que l’une des choses les plus difficiles est de gérer les tâches de la maisonnée avec un nouveau-né. Il est frustrant de délaisser certaines choses, comme le fait d’avoir une maison propre, une panière à linge qui ne déborde pas, des plats travaillés et variés… Or, la vie avec un nourrisson peut exiger de lâcher prise sur certaines choses. Si le portage facilite grandement la vie, et permet tout de même de continuer à exécuter la plupart de nos tâches, il faut aussi compter sur l’état du bébé et la fatigue des parents, et en particulier de la mère, puisque souvent elle se retrouve seule avec le nourrisson, les pères reprenant généralement très vite le travail. Si le nourrisson a un reflux, ou de fortes coliques, pour ne citer que ça, il peut avoir de longues crises de pleurs que rien ne calme. Certaines mères m’ont fait part de pleurs qui duraient pendant des heures… Il est évidemment impensable de gérer les tâches domestiques dans ce cas. Et bien sûr, nous pouvons imaginer l’épuisement physique et psychique de la maman tout le temps que dure cette période difficile. D’autres difficultés peuvent être rencontrées : des suites de couches douloureuses, une difficulté à rester longtemps debout (dans le cas d’une déchirure du périnée, ou d’une cicatrice de césarienne), des seins engorgés au début de l’allaitement ou des crevasses, une mise au sein difficile, une grande fatigue, bref, tout un tas d’éléments qui peuvent affecter la maman (et le papa à son échelle) physiquement et moralement.
Alors certes, tous les débuts de notre vie avec Bébé ne sont pas aussi difficiles, heureusement ! Mais la plupart des parents tireraient profit d’un peu d’aide au quotidien. Certains ont de la famille proche géographiquement, avec laquelle ils s’entendent bien, et peuvent bénéficier d’un relais. Mais nombreux sont ceux qui sont très isolés. Cependant, dans le cas où vos parents sont proches de chez vous, mais n’adhèrent pas à votre façon de faire avec votre enfant, il peut toujours être envisageable qu’ils vous apportent de l’aide pour les tâches ménagères et la préparation des repas, tandis que vous vous consacrez à votre bébé. Et si vous redoutez leurs remarques, peut-être est-il possible de leur faire entendre que vous voulez faire les choses à votre manière et que vous avez besoin d’encouragements plutôt que de critiques.
Et dans le cas où recevoir de l’aide de votre famille n’est pas envisageable, il reste les ami.es. Beaucoup ne penseront sûrement pas à proposer leurs services, mais il est probable que si vous demandez, vous obteniez une réponse positive. Demander de l’aide est souvent vu comme un aveu d’échec : il n’en est rien ! C’est tout simplement nécessaire, et l’entraide est la base de toute communauté. Vouloir se débrouiller seul.e dénote peut-être d’une certaine force de caractère mais cela peut finir par avoir des retombées plus tard. Et pourquoi se priver de quelque chose qui nous soulagera ?
Enfin, si du côté des amis cela n’est pas possible, il reste les aides à domicile. Tous les jeunes parents y ont droit1.
Le soutien moral
Si les tâches du quotidien sont une partie importante de notre vie d’adulte et de parent, et qu’il est agréable de s’en voir soulagé, nous avons, en tant que jeune parent, des questions, des doutes, nous sommes même parfois complètement perdus. Est-ce que je fais bien, mal ? Pourquoi pleure-t-il ainsi ? Est-ce normal que je ne puisse pas le poser ? Est-ce que mon écharpe est bien nouée, mon bébé est-il bien installé ? Mon bébé se réveille toutes les heures pour téter, je suis épuisée, que puis-je faire ? Bref, toutes ces questions ont besoin de trouver des réponses. Et il y en a plein, en fait. Il suffit d’en parler à nos parents, à la voisine, la boulangère, d’aller voir sur Internet, nous aurons tout un tas de réponses. Mais vont-elles nous convenir ? L’un nous dira de laisser pleurer notre enfant, l’autre que nous le portons trop, on nous répétera que nous devrions arrêter l’allaitement car cela nous fatigue, etc.
Première étape : se tourner vers les bons interlocuteurs. Par « bons », je ne veux pas dire que les autres sont « mauvais », mais qu’ils ne nous correspondent pas. Partons donc à la recherche de personnes qui ont fait les mêmes choix que nous, pour partager nos expériences, recevoir une écoute bienveillante, du soutien et des conseils. Notons que même parmi les personnes adeptes d’un accompagnement respectueux de l’enfant, tous ne sont pas très tendres avec leurs pairs, et certains parents ont la mauvaise surprise de recevoir des remarques acerbes et des jugements parfois violents quand ils partagent sur leurs choix ou même quand ils ont posé une simple question. Pour cela, les réseaux sociaux sont terribles… Et nous sommes particulièrement vulnérables aux critiques et au jugement des autres lorsque nous sommes jeunes parents et que nous avons encore peu d’assurance. Heureusement, les personnes soutenantes et heureuses d’aider sont nombreuses. Si vous avez de la chance, vous avez près de chez vous une association qui propose des temps d’échange entre parents qui pratiquent le maternage proximal, des ateliers de portage, des réunions LLL2…
Et si ce n’est pas le cas, vous pouvez faire des rencontres sur Internet, les réseaux sociaux regorgent de communautés de parents adeptes du maternage proximal. Sur Facebook, vous pourrez même trouver des groupes de parents par région.
Sororité
Même si nous encourageons, dans nos lignes, les pères à s’investir pleinement dans leur parentalité, je finirai cet article en m’adressant tout particulièrement aux femmes. Nous assistons aujourd’hui à un retour du concept de sororité, qui a été trop longtemps oublié. D’ailleurs, ce mot, « sororité », est découvert très tard dans nos vies, voire pas du tout. On entend parler de fraternité dès le plus jeune âge, mais de la sororité nous n’entendons rien… Quand nous voulons parler d’entraide entre filles ou entre femmes, nous parlons plutôt de « solidarité féminine », ce qui n’est pas la même chose car ponctuel et plus superficiel. La sororité est un lien plus profond et il est permanent. Et quand une femme devient mère, que par le fait d’avoir donné la vie elle s’est reliée à toutes les femmes qui ont enfanté avant elle ou qui le feront après elle, elle a plus que jamais besoin de ses « sœurs ». De leur aide, de leur soutien, de leur écoute. De savoir qu’elles sont là quoi qu’il arrive et qu’elles la comprennent.
Pouvoir parler quand ça ne va pas, poser des questions, communiquer sur ce qu’on ressent dans son corps, tout en sachant qu’on ne sera ni jugée ni critiquée, recevoir des conseils bienveillants, des encouragements à prendre soin de soi, tout cela fait partie d’une relation qui nous tire toutes vers le haut et profite à chacune. Comme nous le disions, la sororité revient de plus en plus et on ne peut que s’en réjouir ! Car plus les femmes s’entraideront, créeront du lien, plus elles seront entourées, soutenues, et plus elles pourront savourer leur vie de jeune mère dans la douceur et l’amour, en avançant avec confiance.
1 Voir sur le site de la CAF : http://www.caf.fr/allocataires/vies-de-famille/futur-parent/naissance/l-aide-au-domicile-des-parents-c-est-possible
2 La Leche League : association de soutien et d’information pour l’allaitement maternel.